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Trump ou l’histoire avec une grande hache

  • francoishada
  • 20 mars
  • 3 min de lecture


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Donald Trump est-il néo-fasciste? La question court la plaine tant le comportement de ce président est difficile à cerner. Brutal, autoritaire, versatile, revanchard… il est un despote du 21e siècle pour une Amérique partie en vrille, qui écrit l’Histoire avec une grande hache.

Umberto Éco énumère ce qui permettrait d’identifier le fascisme. Cette doctrine serait repérable via les critères suivants : 

- Culte de la tradition qui empêche l’avancée du savoir: la révolution trumpienne propose ce retour vers une tradition, un passé glorieux, certes rêvée mais ancrée dans l’imaginaire américain. Le traditionnalisme refuse ainsi ce qui est moderne au sens des Lumières, et pousse à l’irrationalisme: les assauts répétés contre l’éducation nationale et toute forme d’avancée scientifique, le retour jusque dans les manuels scolaires, sur des vérités scientifiques bien établies, participe du trumpisme.

- ⁠La promesse d’une révolution et le culte de l’action pour l’action par opposition à la culture toujours suspecte: la tronçonneuse venue d’Argentine, les décrets à l’emporte pièce, les expulsions hors du droit d’immigrés, le démantèlement de l’administration, les annonces d’actions radicales, à coups de « you’re fired », illustrent malheureusement ce critère. L’annonce de l’action prévaut sur l’efficacité politique. La révolution technologique, symbolisée par Elon Musk, est promise par les gafam de la Silicon valley et leurs exigences en matière de dérégulation. Le volet technologique de la révolution, comme ce fut le cas dans l’Allemagne des années 30, relève de la recherche de puissance et non pas de progressisme.

- ⁠Considérer que tout désaccord est une trahison: avec Trump, on est avec lui ou contre lui. Il n’y a aucune place pour la nuance. Et la vengeance devient un acte politique, jusqu’à la remise en cause des décisions du mandat de Joe Biden.

- ⁠Peur de la différence : Trump agite la peur de la différence, gommant tout ce qui ne lui semble pas « normal » en publiant des décrets lapidaires: le transgenre, le woke, les soit-disant pratiques de haïtiens… tout est bon à inventer, déformer, jeter à la vindicte populaire.

- ⁠Appel aux classes moyennes ou inférieures qui se sentent « déclassées » ou méprisées et sont scandalisées par la richesse ostentatoire présumée des autres: on retrouve ici le socle politique de Trump, l’Amérique déclassée, les petits blancs (white trash) qui soupçonnent l’élite de comploter à leur dépens…

- ⁠Accorder un privilège au fait d’être né dans un même pays, c’est à dire que l’étranger est l’ennemi qui définit en creux l’identité nationale: autre credo trumpien, les étrangers sont hors de la Cité et n’ont pas vocation à y entrer un jour. D’où les annonces fracassantes d’expulsions massives et de murs rendant les frontières étanches.

- ⁠Ce sentiment d’être assiégé de l’intérieur comme de l’extérieur entraîne la dénonciation d’un complot qui n’a évidemment pas le courage d’être visible: l’ennemi est bien entendu l’autre, celui qui fomente en lâche un complot visant la « bonne » Amérique. L’élite wokiste incarne l’ennemi intérieur à combattre.

- ⁠La vie est une guerre permanente, ce qui conduit au paradoxe : triompher de tous ses ennemis conduit à un dénûment : il faut donc renouveler l’ennemi; Cet état de guerre permanente est source et se nourrit d’un machisme exacerbé; Ainsi, chaque individu peut devenir un héros, jusqu’au culte de la mort;

- ⁠Le pouvoir ne peut être délégué, il doit être conquis par la force et être l’objet de la domination sans partage; Par ailleurs, le fascisme se fonde sur un populisme qualitatif, par opposition au quantitatif qui induirait des droits individuels.  Il en résulte le rejet du parlementarisme qui est par définition l’objet de soupçons puisque l’élu n’y a pas de mandat impératif, donc qu’on ne sait pas ce qu’il fait, surtout si en plus il fait appel à des technos.

- ⁠Enfin, le néo-fascisme parle une langue fruste, au vocabulaire délibérément pauvre pour limiter les instruments du raisonnement… Une langue dont on massacre la syntaxe, la grammaire et l’orthographe n’est plus, dans la bouche de Trump, un outil de réflexion rationnelle. Le langage chaotique d’Hitler dans Mein kampf, celui de Trump ne sont pas, ou pas seulement, le fruit d’une inaptitude à formuler une pensée. Ce travail de démolition souterrain ronge le dialogue démocratique et nous prive de nos moyens d’expression et le fait en prétendant nous rendre notre “liberté”. 


En deux mois. Donald Trump a réussi à cocher toutes les cases. Il faut se garder de conclusions hâtives. Trump n’est pas Poutine… Mais il est un mercantiliste doublé de la puissance militaire : un pilleur sans vergogne, en somme. Et il avait annoncé la couleur dans son programme, comme d’autres dictateurs l’avaient fait. Les nations groenlandaise, panaméenne, canadienne et surtout ukrainienne, le comprennent douloureusement.

La question est moins de savoir si Trump est une parenthèse que de voir si après lui le monde aura complètement changé… et ce que les nations européennes auront fait de ce choc mondial.

 
 
 

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